Colloque
Genre entre actualité et pluralité
Les 20 & 21 novembre 2025 à l’Université de Poitiers
Argumentaire
Bien que l’introduction du concept de genre et sa distinction d’avec le sexe datent des années 1950, ce n’est que relativement récemment et de manière plutôt discrète que le genre s’est imposé et a trouvé une place centrale dans les milieux académiques, comme dans le langage courant et la vie quotidienne. En effet, en tant que concept-outil permettant de nouvelles perspectives d’analyse et de déconstruction de la différence des sexes, le genre interroge les contours couramment admis de cette dernière, et amène à redéfinir aussi, comme par ricochet, le sexuel, le sexué et les sexualités. Ainsi, ce qui était auparavant considéré comme allant de soi à propos de la différence des sexes est aujourd’hui (ré)interrogé, et le genre est invoqué dans un grand nombre de questions et sujets actuels de société : définitions des variations des identités transgenres, queer, non binaires et non conformes ; inégalités sociales dans les rapports hommes/femmes ; violences sexuelles et de genre ; nouvelles configurations familiales et nouvelles formes de parentalité ; programmes d’éducation à la sexualité et aux relations affectives…
En psychologie clinique et à propos de la rencontre du genre avec la psychanalyse, André Green (1997) avait pu souligner que compte tenu des places centrales qu’occupent la sexualité et la différence des sexes au sein de la théorie psychanalytique, le genre constitue l’un « des plus puissants motifs à reconsidérer les piliers sur lesquels [celle-ci] repose ». En outre, dans ce qui peut apparaître comme une mise en garde contre des fourvoiements trop hâtifs ou précipités, il précisait également que le genre ne saurait être ajouté à la théorie psychanalytique par une simple addition à celle-ci.
Par ailleurs, compte tenu de leur référence à la théorie psychanalytique de la sexualité au sein même de leurs bases et fondements, l’utilisation des méthodes projectives référée à l’École française est aussi interrogée et remise au travail par le genre. En effet, autant dans leurs conceptions que dans leurs analyses et investigations, les mobilisations du sexuel, du sexué et des identifications secondaires sexuées aux tests projectifs selon l’École française sont considérées selon le référentiel psychanalytique de la différence des sexes, des sexualités, de la bisexualité psychique et de la psychosexualité, et il convient d’interroger ceux-ci dans leurs accordages et désaccordages avec le genre et à la lumière du genre. Ainsi, les rencontres de la psychanalyse ou des méthodes projectives avec le genre sont à lire dans un double mouvement : d’une part, dans la manière dont le genre interroge la psychanalyse et les méthodes projectives ; et d’autre part, dans la manière dont la psychanalyse et les méthodes projectives peuvent à l’inverse permettre d’appréhender et d’éclairer certains aspects du genre.
De même, dans la continuité de ce dialogue entre le genre et la psychanalyse et les méthodes projectives, il est important de rappeler que le genre est un concept intermédiaire. Il se situe à la croisée du regard psychosocial des rapports du sujet à son genre, au genre de l’autre et à l’autre genre, entre objectalisation et subjectalisation, mais aussi au carrefour de différentes disciplines académiques et de différents registres (individuel, collectif…), des réflexions professionnelles et des expériences de vie, parfois épanouies, parfois souffrantes. C’est à ce titre que le genre invite au dialogue et aux débats interdisciplinaires.