Conférence de Philippe Lacadée

Le 24 septembre à 18H, Amphi S1, séance publique (entrée gratuite)

Pour la première séance de travail du Séminaire Adolescence et hypermodernité. Clinique
psychanalytique de la puberté contemporaine : nouveaux modes de jouissance et inventions
symptomatiques, c’est avec grand plaisir que nous recevons le Docteur Philippe Lacadée,
psychiatre et psychanalyste à Bordeaux, auteur de nombreux ouvrages de psychopathologie et
clinique psychanalytique sur la clinique de l’enfant et de l’adolescent tels que Le malentendu
de l’enfant (2010), L’éveil et l’exil : enseignements psychanalytiques de la plus délicate des
transition, l’adolescence (2007), à l’occasion de la sortie de son dernier ouvrage : Le Dit
poétique d’un ange en exil. Rimbaud avec Lacan (Édition La lettre volée. Collection
Palimpsestes, Bruxelles, Février 2025).

La conférence de Philippe Lacadée est une invite à la promenade, dans les pas de Rimbaud qui
« nous délivre un savoir précieux sur ce temps décisif de la vie qu’est l’adolescence » (p.6).
Son invention du Dit poétique, résolument moderne, cherche à traduire, dans une écriture au
plus près des éprouvés du corps, ce que fut pour lui l’exil de l’enfance, de la patrie de ses mots,
et le pousse vers un nouvel amour, « signe qu’on change de discours » (Jacques Lacan,
Séminaire XX, Encore, Paris, Seuil, 1977, p. 20.).

Philippe Lacadée a su remarquablement nous restituer la logique de l’oeuvre de Rimbaud, et
nous sommes nous-mêmes pressés de l’entendre.

                                                                                            Myriam Chérel et Laetitia Jodeau-Belle

 

Vous trouverez ci-dessous l’argument de présentation de Philippe Lacadée, accompagné de
dessin d’Alice Grimbert réalisé pour l’occasion, et que nous tenons à remercier pour son accord
de publication.
« L’adolescence est cette délicate transition où, pour le sujet, du fait du réaménagement de sa
libido surgit de façon inédite la révélation de son corps comme lieu du nouveau. L’éveil du
sexuel peut le pousser, au nom de « la vraie vie 1 », à rejeter les idéaux auxquels il tenait jusquelà
et à inventer « le nouvel amour2 ». Moment où se révèle l’implication d’un choix d’amour
incluant la dimension d’un acte3, modifiant de façon radicale son lien à son corps et à l’Autre.
Moment de passage logique où s’opère une déconnexion, pour lui, entre son être d’enfant et
son être d’homme ou de femme. Il est poussé à une certaine hâte et à une mise en scène de sa
vie. La dimension de la vérité de son être, tel que le réel de la pulsion l’impose, le pousse à se
mettre à l’épreuve d’un acte, dont il revendique l’authenticité, qui lui sert d’issue à l’impasse
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1 Rimbaud A., « Une saison en enfer – Délires I – Vierge folle », in OEuvre-Vie, Édition du centenaire établie par Alain Borer, arléa, 1991, p.
488.
2 Rimbaud A., A une raison, op.cit.,
3 Lacan J., L’acte Psychanalytique Le Séminaire, livre XIV, L’éthique, Seuil,

 

du rapport à l’Autre. C’est face à cet « éveil du printemps »4, qui ne le laisse pas sans certains
« désarrois », qu’il se doit, alors non sans conséquences, de « prendre position », dans la langue
et dans sa vie. Cette position pousse certains, dans une certaine hâte, à la provocation langagière
et à une mise en scène de leur vie comme tentative de dire l’indicible. Faire entendre ce qui
l’exile « de sa patrie »5 de l’enfance, en réponse à ce qui de cet éveil s’éprouve dans l’inconnu
d’un impossible à dire. Certains n’ont d’autre solution que de court-circuiter l’Autre, pour
d’autres, c’est la montée de l’individualisme, chacune de ces solutions témoignant du sentiment
d’exil qu’Arthur Rimbaud a su saisir un temps dans son effort de poésie, par son Dit poétique6
Rimbaud incarne cet adolescent toujours moderne d’être pressé. « L’homme aux semelles de
vent »7 ne prît pas le temps, il vécût avec le maximum d’intensité. Pour lui, « il s’agit d’arriver
à l’inconnu par le dérèglement de tous les sens »8 suivant ses impulsions et ses pensées. C’est
le champ du culte de la personnalité moderne qu’il a ouvert, nous aidant à concevoir la hâte,
comme une des conditions même de la vie de l’adolescent, qui toujours le souci de se rendre
présent à lui-même, à ce qui lui arrive dans son être et ses pensées. »

                                                                                                                  Philippe Lacadée

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4 Wedekind F., L’éveil du printemps, Gallimard, 1974.
5 Lacadée Ph., thèse de l’éveil et de l’exil développée in L’éveil et l’exil, Éditions Cécile Defaut, 2007.
6 Lacadée Ph., Le Dit poétique d’un ange en exil, Collection Palimpsestes, La lettre volée, Bruxelles, Mars 2O25
7 Arthur Rimbaud surnommé « l’homme aux semelles de vent » par Paul Verlaine.
8 Rimbaud A., « Lettre à Georges Izambard mai 71 », in OEuvre-Vie, op. cit., p. 183.